SOUTENONS L’AUTONOMISATION DES FILLES: Déclaration de Yasmine Sherif, Directrice d’Éducation sans délai, à l’occasion de la Journée internationale des femmes
En cette Journée internationale des femmes, ne perdons pas de vue le pouvoir de l’éducation. Nous avons toutes et tous bénéficié d’une instruction qui, il y a moins d’un siècle, était trop souvent réservée aux garçons, et qui reste aujourd’hui une lointaine utopie pour des millions de jeunes filles.
Je sais, de par mon expérience et celle de ma fille, à quel point une éducation de qualité est clé pour l’autonomisation des filles et des femmes. Il s’agit d’une vérité universelle qui s’applique à toutes les filles du monde. L’éducation donne aux filles les moyens de réaliser leurs rêves et d’atteindre leurs objectifs, mais aussi et surtout de soutenir l’autonomisation d’autres filles. Une éducation de qualité ouvre l’esprit, nourrit l’âme et nous dote d’un outil pour réaliser pleinement notre potentiel au cours de notre vie.
Pourtant, plus de 120 millions de filles n’y ont pas accès parce qu’elles subissent les impacts des conflits armés, du déplacement forcé ou des catastrophes climatiques. Nous ne pouvons faire abstraction de leur humanité, de leurs droits, de leur potentiel et de leurs rêves.
Nous devons faire front ensemble, en tant que communauté mondiale du 21e siècle, et combattre la violence basée sur le genre, nous opposer au mariage d’enfants, agir contre les inégalités au travail, et empêcher que les femmes et les filles du monde entier soient privées d’une éducation de qualité.
Nous devons accorder toute notre attention aux millions de filles laissées-pour-compte dans les situations d’urgence et les crises prolongées. Je suis absolument convaincue qu’en raison de leur souffrance, de leur situation de précarité et des conditions désespérées dans lesquelles elles vivent, ces filles possèdent une capacité unique à accomplir des prouesses inédites et extraordinaires dans la profession qu’elles choisiront. Leur résilience, associée à une éducation de qualité, leur permettra d’apporter une contribution inestimable à la société, à leur pays et au monde en général. Il est dans notre intérêt à toutes et tous de ne pas passer à côté d’un tel trésor.
Pour honorer nos engagements, nous devons faire en sorte que toutes les filles puissent bénéficier d’au moins 12 années d’une éducation de qualité. L’instruction est la clé d’une vie meilleure, non seulement pour les filles qui se trouvent dans des zones de conflit comme en Ukraine et dans le Sahel, pour les millions de filles privées de leur droit fondamental à l’éducation en Afghanistan et pour les filles forcées de quitter leur foyer en Amérique du Sud, en Asie, au Moyen-Orient, en Afrique et même en Europe et en Amérique du Nord, mais pour l’ensemble de la société.
Nous avons la possibilité et le devoir de les aider à s’affranchir d’inégalités millénaires pour briser enfin ce plafond de verre, et de faire de cette génération de filles la « Génération Égalité », celle qui saura libérer le potentiel de l’humanité.
Les défis sont de taille. L’UNESCO, partenaire d’Éducation sans délai, estime que 129 millions de filles ne sont pas scolarisées à l’échelle mondiale, dont 32 millions en âge de fréquenter le primaire et 97 millions l’enseignement secondaire. Pour les filles qui vivent dans des contextes de conflit ou de crise, la situation est encore pire. Dans les contextes de crise humanitaire, deux filles sur trois ne commencent même pas le secondaire. En outre, si les tendances actuelles se poursuivent, d’ici à 2025, les changements climatiques contribueront à empêcher au moins 12,5 millions de filles de terminer leurs études chaque année, selon le Fonds Malala.
Investir dans l’éducation des filles, c’est investir dans l’avenir de toute l’humanité, dans notre civilisation, dans notre évolution, et par-dessus tout dans les droits humains et les objectifs de développement durable. Éducation sans délai, en sa qualité de fonds mondial des Nations Unies pour l’éducation dans les situations d’urgence et de crise prolongée, a fait de la parité entre filles et garçons la priorité de ses investissements dans le cadre des premières interventions en situation d’urgence et des programmes pluriannuels de résilience. Le Fonds s’est également engagé à soutenir des investissements consacrés à l’égalité des genres dans le cadre de son nouveau Plan stratégique pour la période 2023-2026. Par ailleurs, des subventions judicieuses en faveur de l’égalité des genres telles que celles accordées dans le cadre de notre fonds d’accélération, nous permettent de mettre en place les biens publics et le mouvement mondial dont nous avons besoin pour opérer de véritables transformations dans ce secteur.
Imaginez les retombées socioéconomiques si toutes les filles de la planète pouvaient effectivement bénéficier de 12 années de scolarité. Une étude de la Banque mondiale estime que « [l]’accès limité des filles à l’éducation et les obstacles à l’achèvement d’une scolarité de 12 ans coûtent aux pays entre 15 000 et 30 000 milliards de dollars de perte de productivité et de revenus tout au long de la vie ». Imaginez la transformation d’un monde qui se doit désespérément de basculer de l’extrême pauvreté vers l’équité, et d’instaurer la paix, la sécurité et la protection des droits humains pour toutes et tous. C’est la promesse que nous avons formulée en 1945 dans la Charte des Nations Unies. Il ne s’agit pas d’une utopie, mais d’une possibilité bien réelle. Nous savons ce qu’il convient de faire : soutenir l’autonomisation des filles en assurant leur accès à une éducation de qualité.
En effet, la solution passe par l’éducation.